Le marketing de contenu, nouvel horizon de la communication?

 

Encore une fois, le marketing cherche à donner le « la » de la communication des entreprises. Place au marketing de contenu (content marketing), que ce soit pour nourrir le discours de marque ou pour alimenter sous différentes formes le « public » interne. Selon ses concepteurs, le numérique appellerait une nouvelle donne quasi industrielle dans la production des messages à destination des blogs, des réseaux sociaux et des plateformes en tous genres. La grande affaire est non seulement la production, mais surtout le contrôle des contenus dans un univers où la diversité, la pluralité, voire la liberté sont de mise, quoiqu’il en coûte parfois.

On voit bien ce qui se joue. Pas question de laisser la communication sans contrôle à l’heure des réseaux sociaux. Alors, on produit du discours, des images, des messages. C’est une des dimensions de la fonction communication que de structurer le discours. Le problème, c’est que ce n’est pas la seule. Or, cette approche marketing tend au nom de la cohérence et du contrôle, à une uniformisation derrière la diversité apparente des formes et à une mise au pas de ce qui se dit. De plus, cette offre de communication concerne aussi bien l’interne que l’externe, le client et le salarié dans un même flux. Les communicants sont appelés à « produire » de façon intensive du discours, des chiffres, des infographies, du son et des images pour occuper le plus possible les nouveaux espaces numériques. Le tout bien sûr dûment validé. Le marketing de contenu étend à grande échelle en la diversifiant la logique des éléments de langage.

Pas étonnant de retrouver tous les travers d’une communication essentiellement descendante, avec à la clé beaucoup de langue de bois. Et cela, dans des supports qui ne font pas bon ménage avec elle. Ne nous y trompons pas, le marketing est toujours sur une logique de cible, alors que la communication se joue pour l’essentiel désormais sur la relation et la conversation. On n’engage pas une conversation à coup de marketing content. Curieusement, la vision quasi industrielle que prônent aujourd’hui certaines agences est à contre courant à la fois des attentes et de la nature même des outils de communication. Les entreprises ont à construire un équilibre entre ce qu’elles disent et ce qu’on leur dit. Encore faut-il écouter, dialoguer, discuter. Quand le contenu se déploie à haut débit sans l’écoute, on occupe certes l’espace, on le sature parfois et la réception en pâtit toujours. Ce n’est pas nouveau, mais la peur de certaines dérives (bien réelles) des réseaux sociaux amène au retour de conduites de contrôle et de verrouillage non seulement hors d’âge, mais inefficaces.

Le rapport aux médias et aux journalistes est un bon indicateur de cette conception en définitive très fermée et autosuffisante de la communication. La liberté de la presse d’accord, mais point trop n’en faut… L’aventure toute récente dans la sphère politique d’une communication hyper contrôlée et de messages répétés en boucle pour essayer de contrer des médias jugés trop critiques montre qu’en matière de communication on ne gagne pas à rester dans le contenu univoque. Sans doute cherchait-on à importer des pratiques d’entreprise dans le champ politique. A tort manifestement.