Communication interne: la grande discrète au centre du jeu

Pour ses trente ans, l’Afci vient de rendre publique une importante étude consacrée à la communication interne. C’est la première fois que l’on dispose de données quantitatives, qualitatives et prospectives aussi riches sur cette grande discrète de la communication d’entreprise. L’étude a fait l’objet d’une collaboration avec deux psychosociologues et avec les instituts Occurrence et Harris Interactive. Les résultats complets sont disponibles sur le site de l’association (https://www.afci.asso.fr/publications/toutes-les-publications/faire-tenir-ensemble-les-entreprises-une-fonction-clef-mais-peu-connue/). Je vous en recommande vivement la lecture. Avec cette étude, bien des préjugés ou des clichés tombent.

Je voudrais pour ma part relever quelques points qui me paraissent essentiels.

Etendue et plurielle

 La présence et la structuration de la communication interne révèlent à la fois son étendue et sa diversité. Pas de modèle a priori, mais une réalité plurielle en fonction notamment de la taille de l’entreprise et de ses enjeux. Les communicants qui ont répondu à l’enquête quanti sont à 46% dans des entreprises de moins de 2000 salariés. Près d’un quart sont dans des entreprises de moins de 500. Tantôt une personne seule, tantôt une petite équipe, tantôt un temps plein dédié à l’interne tantôt un temps partagé interne/ externe. Une certaine représentation qui voudrait que la communication interne ne soit vraiment présente et organisée que dans les grandes entreprises ne correspond pas à la réalité. De même en termes de structuration trouve t-on la communication interne rattachée tantôt à la direction de la communication, tantôt à la direction générale, tantôt à la DRH ou à des entités type direction de la transformation. Cette extension et cette diversité de la fonction ne sont manifestement pas un handicap, même si certains prônent une modélisation notamment dans les grandes entreprise.

Au centre du jeu

La position du communicant interne mérite attention. Il tire sa force d’une capacité d’entrer en relation dans l’entreprise aussi bien avec les dirigeants qu’avec les salariés. Dans des univers complexes et cloisonnés, cette position assumée et revendiquée par les praticiens est peut-être la vraie nouveauté de l’étude. Les communicants internes n’occupent pas les premières places et une certaine discrétion qu’on leur reconnaît volontiers s’avère, contrairement aux apparences, une force. Elle leur permet d’entrer en relation avec le haut comme avec le bas et surtout d’être crédible. Cette position «centrale » montre surtout que le communicant interne conçoit son métier dans ce rapport aussi bien avec le sommet de l’entreprise qu’avec le terrain. Objectif : faire tenir ensemble l’entreprise. Il y a là quelque chose de l’ordre de la médiation au vrai sens du terme qui correspond bien à des relations dorénavant plus horizontales comme aux enjeux de l’intelligence collective.

Lucides et investis

La tradition dans le monde de la communication est en général d’annoncer les bonnes nouvelles et de ne voir les choses que du bon côté. L’étude montre des professionnels de la communication interne qui ne cachent pas les difficultés ou les manques. Il y a comme une forme de lucidité chez eux qui va avec un investissement professionnel exigeant. En clair, on dit les choses quand ça ne va pas ou quand les dispositifs de communication ne sont pas au mieux,  s’agissant par exemple des réseaux sociaux d’entreprise. Cette lucidité témoigne d’un professionnalisme qui, dans leur cas, n’est pas désenchanté. On a conscience d’être dans un moment carrefour. On sait les embûches, les difficultés, les carences. En même temps, on se projette, forts de ce que l’on représente et de ce à quoi on tient.

Vers une nouvelle alliance communicants-managers ?

 Parmi les sujets où le bât blesse, il y a la communication managériale. Le compte manifestement n’y est pas. Or, les communicants internes sentent qu’il s’agit d’une nouvelle frontière pour le métier. C’est peut-être là justement que leur fonction médiatrice peut demain le mieux s’exercer. A condition de nouer une véritable alliance avec les managers. Dans la partie prospective de l’étude, les communicants l’appellent de leurs vœux à partir d’une connaissance réciproque de la réalité de chacun. Les communicants ont besoin des managers comme les managers des communicants. Pour une raison sans doute essentielle qui tient à la place déterminante de la communication dans le travail.

Pour toutes ces raisons et bien d’autres encore, l’étude de l’Afci est majeure car elle permet de saisir la réalité d’un métier encore méconnu et les perspectives qui s’offrent à lui. Décidément, une étude à ne pas manquer.